Bernhard Hofer
Du rarement vu: la Cour Pénale Internationale (CPI) fait la une de la presse internationale, notamment allemande, anglaise, et française.
Du rarement vu: la Cour Pénale Internationale (CPI) fait la une de la presse internationale, notamment allemande, anglaise, et française.
A l'origine de l'intérêt médiatique se trouve une décision pas moins extraordinaire: la décision d'ouvrir une enquête en Libye contre M. Kadhafi et ses fils pour crimes contre l'humanité.
D'abord, l'ouverture de l'enquête s'inscrit dans une ligne de succès timides de la CPI, notamment l'arrêt de Callixte Mbarushimana par les autorités françaises le 11 octobre 2010. La France semble ainsi faire preuve d'une volonté de coopérer avec la juridiction de La Haye, notamment face à des critiques persistantes concernant l'adaptation du droit pénal français.
Bien entendu, l'ouverture de l'enquête a une importance qui va au-delà du cas de la Libye. A l'en croire Gérard Araud, ambassadeur de France à l'ONU, "C'est un avertissement à tous les dirigeants qui pourraient être tentés d'user de la répression contre ce que j'ai appelé ce vent de changement et de liberté". En effet, la rapidité de la décision d'ouvrir une enquête constitue une innovation pour une juridiction que jusque là n'était saisie que bien longtemps après la survenance des faits incriminés. Ainsi, la Cour fait sans doute preuve d'une volonté d'agir de façon proactive afin de non seulement punir, mais aussi tenter de prévenir des crimes.
De plus, la décision unanime du Conseil de sécurité de l'ONU de saisir la CPI et surtout le soutien de la Chine et de la Russie, pays traditionnellement hostiles à toute ingérence dans les affaires internes d'un pays, sont novateurs en matière de justice internationale, surtout compte tenu des enjeux géopolitiques et pétroliers. Ainsi, la présente affaire pourrait bien constituer une nouvelle étape dans l'évolution de la CPI, caractérisée par une plus grande confiance de la Cour et un soutien plus volontaire de la communauté internationale et les membres du Conseil de sécurité.
Cependant, la prudence et le recul s'imposent: l'enquête pourrait bien constituer un cas singulier et unique. Rappelons-nous que l'affaire libyenne occupe depuis des semaines le devant de la scène internationale et a causé d'énormes échos médiatiques et politiques. La pression de l'opinion publique était considérable et invitait les dirigeants à agir d'une manière hautement symbolique. La donnée pourrait être tout autre pour des affaires moins "spectaculaires" (bien que pas moins graves) n'impliquant pas un tel intérêt médiatique et politique. Les affaires africaines dont traite la CPI actuellement et qui passent largement inaperçues par le grand public illustrent ce dilemme.
Ainsi, la présente affaire pourrait bien s'inscrire dans l'évolution critiquée par le journal The Economist, qui évoque le manque de confiance et de coopération avec la CPI parmi les pays africains, s'il s'avère que l'ONU et la CPI n'agissent qu'une fois le public étant averti et la situation étant devenue intenable. Le traitement de l'affaire libyenne et des affaires déjà ouvertes sera examiné à la loupe par la communauté internationale afin de tester le sérieux de la Cour et des Etats membres.
Néanmoins, pour l'instant la décision de saisine est a approuver comme elle pourrait aussi bien constituer une toute nouvelle étape pour la justice pénale internationale.
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